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Crise en RDC : le retour des autorités de Kinshasa à Goma et Bukavu projeté dans le futur proche

Un vent d’espoir souffle sur l’est de la République Démocratique du Congo, mais l’avenir demeure suspendu à de délicates négociations.

Au lendemain de la signature de la déclaration de principes entre le gouvernement congolais et le mouvement armé AFC/M23, samedi 19 juillet à Doha, un point attire toute l’attention : le retour progressif de l’autorité de l’État dans les zones contrôlées par les rebelles, notamment à Goma et Bukavu.

Un principe consensuel, une mise en œuvre floue

Dans le document signé au Qatar, la restauration de l’autorité de l’État est présentée comme une priorité, mais aucune mention explicite d’un retrait immédiat des combattants de l’AFC/M23 n’y figure. Une absence qui soulève des interrogations à Kinshasa comme dans les territoires occupés, où l’AFC/M23 a érigé une administration parallèle, allant jusqu’à nommer ses propres “gouverneurs”, percevoir des taxes, et mettre en place un embryon de circuit bancaire.

Dès lors, le retour des autorités gouvernementales à Goma et Bukavu est envisagé à long terme, dans un processus gradué qui devra être défini dans un futur accord global de paix, attendu au plus tard le 17 août prochain. La feuille de route convenue prévoit l’ouverture des discussions directes d’ici le 8 août, discussions qui devront statuer sur les étapes, les garanties sécuritaires, le calendrier et la cohabitation éventuelle entre structures de l’État et administration rebelle transitoire.

Kinshasa face à une impasse stratégique

Selon plusieurs sources diplomatiques, Kinshasa aurait renoncé à exiger le retrait immédiat comme préalable, un point d’achoppement majeur lors des négociations précédentes menées notamment dans le cadre du processus de Nairobi. À défaut de pouvoir contraindre militairement l’AFC/M23, soutenu selon plusieurs rapports par le Rwanda voisin, le gouvernement de Félix Tshisekedi semble avoir opté pour une stratégie de compromis progressif, misant sur un cadre politique encadré par des garants internationaux, dont le Qatar, les États-Unis, l’Union africaine et les Nations Unies.

Mais le terrain reste miné. Car de leur côté, les cadres de l’AFC/M23 ont réaffirmé à travers plusieurs canaux leur refus de quitter les zones conquises, à moins d’un partage du pouvoir local et d’une reconnaissance politique de leur mouvement.

Un avenir incertain, entre paix durable et risques de basculement

Pour le professeur Martin Ziakwau, analyste politique à l’Université Catholique du Congo, la signature du texte à Doha ne marque que le début d’un processus complexe. « Le plus important, ce n’est pas d’arriver à la fin d’un feuilleton militaire, mais de créer les conditions d’une paix durable », avertit-il.

Et cela passe par un accord inclusif, insiste-t-il. « Les autres parties prenantes, notamment les groupes armés issus du processus de Nairobi, les leaders communautaires, et les représentants de la société civile doivent être associés. Sinon, le risque est grand d’un renversement d’alliances sur le terrain, ce qui compromettrait l’ensemble du processus. »

D’autres observateurs craignent que les groupes Mai-Mai, Nyatura ou APCLS, marginalisés dans ces discussions bilatérales, rejettent le processus de Doha. Une telle rupture pourrait alimenter une recomposition militaire imprévisible, avec des conséquences désastreuses sur la sécurité des civils.

Un retour des autorités prévu, mais sous conditions

D’après une source diplomatique proche du dossier, le retour des autorités civiles dans les grandes villes de l’est ne devrait pas se faire avant fin 2025, dans le meilleur des cas. Ce retour dépendra de la mise en œuvre effective d’un cessez-le-feu, du désarmement progressif, de la réintégration de certains cadres du M23/AFC dans les institutions locales, et d’une vérification stricte par des observateurs internationaux.

Un dispositif conjoint de sécurité entre FARDC, M23 et forces neutres serait aussi en discussion. « Le scénario le plus réaliste est une cohabitation temporaire, encadrée et surveillée, avant un transfert complet de l’administration à Kinshasa », estime un analyste régional du Crisis Group.


En résumé

  • Le retour des autorités congolaises à Goma et Bukavu est évoqué dans la déclaration de Doha, mais renvoyé à un accord de paix global.
  • Le mot « retrait » du M23 n’apparaît pas, créant des zones d’ambiguïté.
  • Le gouvernement mise sur une stratégie de normalisation par étapes, en négociant un calendrier progressif et sécurisé.
  • La réussite dépendra de l’inclusivité du processus et du soutien des autres acteurs armés et civils.

Ilunga Mubidi Oscar

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