Un nouveau débat politique agite la République démocratique du Congo. Olivier Kamitatu, ancien président de l’Assemblée nationale et proche de Moïse Katumbi, a révélé ce qu’il qualifie de plan secret de Félix Tshisekedi pour modifier la Constitution et remodeler le système institutionnel congolais.
Dans une chronique publiée récemment, Kamitatu accuse le Chef de l’État de vouloir adapter la Constitution « à ses ambitions personnelles » en ouvrant la voie à un mandat présidentiel de sept ans et en instaurant le poste de vice-président de la République, qui serait confié à Jean-Pierre Bemba Gombo, actuel ministre de la Défense.
« Le plan, élaboré par le professeur Mbata et son équipe de constitutionnalistes, est prêt. Il prévoit de déverrouiller l’article 220, de supprimer le poste de Premier ministre et de créer un mandat présidentiel de sept ans. Le président issu du parti majoritaire serait ensuite assisté par un vice-président. Le ticket est déjà établi : Tshisekedi et Jean-Pierre Bemba », a affirmé Kamitatu.
Un débat ancien qui refait surface
L’idée d’une nouvelle Constitution n’est pas nouvelle. Le 19 août 2023, lors d’une conférence à Kinshasa, le professeur Isidore Ndaywel avait déjà présenté un projet de réforme visant à remplacer le poste de Premier ministre par celui de vice-président et à allonger le mandat présidentiel à neuf ans non renouvelables.
Un an plus tard, le 23 octobre 2024, Félix Tshisekedi a confirmé sa volonté de doter la RDC d’une nouvelle loi fondamentale. À Kisangani, il avait déclaré que la Constitution actuelle, en vigueur depuis 2006, ne correspondait plus aux réalités congolaises, laissant entendre que des réformes profondes étaient inévitables.
Une opposition vent debout
Ces annonces ont immédiatement suscité la réaction des forces politiques et sociales. Le 9 novembre 2024, plusieurs membres de l’opposition et de la société civile ont tenu une conférence de presse à Fatima (Kinshasa) pour dénoncer ce qu’ils considèrent comme une tentative de confiscation du pouvoir.
Selon eux, le projet de Tshisekedi équivaudrait à une manœuvre pour briguer un troisième mandat déguisé, en violation de son serment constitutionnel. « Le président s’expose, ainsi que ses complices, à des poursuites pour haute trahison, un crime imprescriptible », ont averti certains leaders de l’opposition.
Quels enjeux pour l’avenir politique de la RDC ?
L’éventualité d’un tandem Tshisekedi-Bemba, avec un mandat présidentiel rallongé à sept ans, voire neuf, bouleverserait l’équilibre institutionnel de la RDC. Elle redessinerait également les rapports de force au sommet de l’État en supprimant le poste de Premier ministre, pivot actuel du régime semi-présidentiel instauré en 2006.
Pour ses partisans, une telle réforme permettrait de donner plus de stabilité au pays et d’adapter ses institutions aux défis actuels. Mais pour ses détracteurs, il s’agit d’une dérive autoritaire et d’une menace directe contre la démocratie congolaise.
Certains analystes pensent que le remplacement en cours de Vital Kamerhe au perchoir de l’Assemblée nationale s’inscrit dans cette optique.
Le débat est donc loin d’être clos. Reste à savoir si Félix Tshisekedi osera franchir le pas, et si le peuple congolais acceptera qu’une nouvelle Constitution redéfinisse les règles du jeu politique à quelques mois des prochaines échéances électorales.
Patrick Kalume Mwanamulume